vins étrangers font désormais partie intégrante du paysage viticole aux yeux du monde.
Il y a quelques décennies, et encore au milieu des années 90, nos vins français restaient la référence indiscutable et absolue
aux yeux (aux palais plutôt) de tous.
Voilà qu’une quinzaine d’années plus tard, ceux-ci ont été bien sévèrement bousculés par les vins émergents des pays du nouveau monde. Quelles sont les solutions envisageables afin de remédier à
cette féroce concurrence ?
LES VINS FRANÇAIS TROP COMPLIQUES ?
L’architecture de nos vins, en terme gustatif reste souvent difficile à décrypter pour le néophyte. A des vins puissants, au caractère affirmé, aux
tannins souvent durs, et aux acidités ciselées et nerveuses, il faut ajouter une multitude de cépages et des appellations bien nombreuses, et surtout hétérogènes en terme de
qualité.
Il est donc souvent difficile pour le consommateur peu averti de s’y retrouver parmi la jungle des vins français.
VINS DE TERROIR A LA FRANCAISE VS VINS DE CEPAGE A L’ AMERICAINE
En simplifiant un peu le discours, et dans un souci de compréhension, on peut réduire cette bataille à cela.
La France propose des vins de terroir, soucieux de préserver une identité forte. Alors que les américains, les chiliens ou australiens, identifient leurs vins non pas, à un terroir, mais à un ou
des cépages.
Le mot « terroir », vous l’avez remarqué, n’est pas traductible dans une autre langue, que le français. Ce
terroir, reste bien la spécificité française.
Le terroir est l’adéquation entre un climat et un sol donné. La France propose un système d’AOC (appellation
d’Origine Contrôlée), forcément complexe pour le non-initié. Même si celui-ci l’est, ce système est envié à travers le monde par sa cohérence absolue.
EN FRANCE
Le système d’AOC protège certes l’appellation, ainsi un Chablis ne peut qu’être élaboré à Chablis. Une AOC, a
une charte forcément restrictive, dans la mesure où il exige le respect d’un encépagement bien spécifique.
Dans la région bordelaise, il faut savoir qu’il existe plus de 50 AOC ! Que la Bourgogne est très morcelée et régie par
pléthore de parcelles. Les « climats », classés en 1er cru, et pour les meilleurs, en Grand cru.
Il est aisé de constater à quel point ce système reste délicat à maîtriser lorsque l’on n ‘y connaît que peu de choses en
matière de vins.
DANS LE NOUVEAU MONDE
A l’inverse, les pays émergents ont opté pour un système bien plus simple, dans la mesure où au delà de la
provenance d’un climat, ou d’un sol particulier, l’accent est porté sur le cépage.
Cette spécificité apporte une grande simplification aux yeux du néophyte dans la mesure où celle-ci offre une plus grande
assurance, non pas donc sur la provenance mais sur un goût.
Ainsi, le consommateur s’oriente sur un style de vin bien défini. Evidemment, ici, le caractère du vin, n’est pas ce que l’on recherche mais plutôt sa facilité de compréhension.
Le vin de cépage standardise le goût, l’uniformise, afin de séduire le nouveau consommateur par des vins sachant flatter ses
papilles. Du volume, du fruit, des tanins effacés. Parfois grossiers, voire vulgaires, ces vins ont le mérite de se montrer approchables à ses yeux. Et surtout compréhensibles.
QUELQUES EXEMPLES DE CEPAGES
Le cépage sauvignon imprime des silhouettes élancées, sur le fruit blanc acidulé (pomme verte et les agrumes (citron,
pamplemousse, zestes) , vins vifs, et mordants, emplis de fraicheur (acidité).
Le chardonnay, par exemple est plus rond, charnu sur des arômes de fruits blancs plus mûrs, (poire, pêche).
Le merlot, offre des vins rouges ronds et suaves, aux tanins souvent confortables, non rugueux. Vins faciles
et emplis de volume.
Le cabernet sauvignon lui apporte des silhouettes plus élancées, et fraiches (aciditié toujours), et des tanins plus austères. Vins plus durs, qu’il faut savoir attendre. Mais il
est possible de maquiller ses tanins afin de le rendre plus confortable.
Le gamay, cépage du beaujolais apporte de fruit, de la fraicheur, et très gourmand et croquant. Vin facile de compréhension.
DE GRANDS VINS AILLEURS MALGRE TOUT
Il serait trop facile et aussi injuste de déclarer que l’on ne trouve que des vins de cépage ailleurs.
Néanmoins, à des prix faibles, correspondant ce type de vins. Et, sincèrement, entre une shiraz (syah) australienne et un vin de Pays de chez nous, à 5 euros, bien souvent, le vin australien
saura se rendre tellement plus flatteur.
Les élevages ne sont pas les mêmes, les restrictions non plus.
Malgré tout, force est de reconnaître qu’il existe de très beaux vins de terroir, aussi, à l’étranger.
Barolo, Chianti, Ribéra del Duéro, en Italie, et en Espagne, mais aussi au Portugal, ou ailleurs encore. Dans le Vieux Continent, on trouve jusqu’en Grèce de superbes vins délimités, de terroir.
Aux cépages multiples empreints de minéralité, portant à merveille la patte de terroirs magnifiques.
LES VINS DE TERROIR FRANÇAIS SOUFFRENT
Tant d’AOC en France, de régions multiples et de cépages qui le sont tout autant. Comment s’y reconnaître ?
Nouvellement conditionné par le marketing et le matraquage permanent des vins dits de cépage du nouveau monde, aux prix relativement bas. Rassuré par ces vins monocépages, techniquement bien
élaborés afin de satisfaire son palais peu initié.
Ce même néophyte est perdu dans les étals et les linéaires des grands magasins ou des caves.
Les vins proposés à la vente, souvent très jeunes, ne sont pas prêts à la dégustation, les acidités sont encore agressives, et les tanins durs.
QUE FAIRE ?
Tout bousculer ? Réformer le système des AOC serait une erreur fondamentale. Ce système nous est envié par le
monde entier, grâce à sa cohérence. Un cépage sauvignon planté sur un sol calcaire ne donnera pas le même résultat que sur un sol argileux. C’est tout l’intérêt des AOC. Rendements contrôlés,
cépages définis, sur un terroir défini.
Créer nos propres vins de cépages, vins de marque ? Ce serait faire affront et non front.
L’américain venant au restaurant réclame un Chardonnay. On lui sert un Chablis…il vous stoppe tout de go, et insistera sur
le fait qu’il souhaite un chardonnay ! Pourtant, le vin de Chablis est bien issu du cépage chardonnay. Il ne le savait pas. Inquiétant quand on sait que le Chablis est l’appellation la plus
connue au monde.
Afin de régler ce problême, ne faudrait il pas rendre obligatoire les proportions des cépages en contre-étiquette ? Rien que
cela permettrait aux néophytes de mieux assimiler les cépages, et les terroirs.
L’ UNION EST DIFFICILE EN FRANCE
A l’étranger chaque région sait se promouvoir, tous les domaines avancent main dans la main, permettant ainsi
la véhiculation d’une image renforcée à travers la planète.
En France, la guerre de clochers, est permanente, la menace ne provenant non pas des vins du monde, mais de son voisin. Aucune coordoniation, juste des désaccords qui ne font que reculer ! Mais
avancer l’échéance.
Si les petits récoltants qui vivent chez nous une crise unique et déjà bien ancrée ne réagissent pas en s’ouvrant l’esprit, et
au monde, alors, ils mourront très bientôt.
CONCLUSION
Les vins du nouveau monde, ont introduit de nouvelles données. Vins faciles et uniformes. Certes, les moyens
à l’étranger ne sont pas les mêmes, certes, leur système d’appellation leur offre plus de possibilités, mais surtout, les winemakers ont compris qu’ils ne pourront avancer qu’en s’ouvrant
l’esprit, en s’intéressant au savoir-faire cultural français et européen. Ultra-dynamiques, ils ont poussé dans leurs retranchements les vignerons français qui sont restés campés dans leurs
positions trop protectionnistes, qui ne peut que les faire reculer.
Malheureusement, nos dirigeants politiques, incultes en matière de vins, établissent des lois suicidaires
(Loi Evin, interdisant la publicité, par exemple). Interdiction possible de vendre du vin français sur Internet…sans compter les guerres intestines envahissant nombre d’appellations
françaises.
Pourtant, cette concurrence, effectivement féroce, doit permettre à nos vignerons les plus sérieux,
d’avancer, en acceptant de prendre pour exemple certaines valeurs, surtout commerciales et marketing du nouveau monde.
Qu’enfin, notre vigneron se pose la question avant d’élaborer son vin : A qui vais-je adresser mon vin ?
Comment séduire mon client ? Comment élaborer le meilleur vin possible et comment le promouvoir ?
C’est ainsi, que le petit récoltant isolé du monde, sans internet s’en sortira, sans perdre pour autant son identité.
La révolution est en marche… !
Emmanuel Delmas
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Basba
Bonsoir Emmanuel,Bravo pour votre site que me fait découvrir le blog de notre commune (vanves92170.hautetfort.com).Concernant les vins du monde, il manque un pays majeur : l’Afrique du Sud! Si vous désirez y faire un tour, je vous conseille un hébergement idéal pour rayonner entre La ville du Cap et ses vignobles (Stellenbosch, Franschoek, Paarl, Constantia) : http://www.intaba-lodge.com .Bon OK, mon conseil d’hébergement est subjectif puisqu’il s’agit de la résidence de mon père (pub intéressée donc, hum hum…). Mais sachez qu’il y a d’autres hébergements d’aussi bonnes qualités dans ce magnifique pays qui mérite d’être visité par tout amateur de vin.
Emmanuel DELMAS
Bonsoir,
Merci pour cette info, et cette visite.
L’Afrique du Sud est effectivement un beau pays du vin. Je ne peux qu’acquiescer, à l’occasion j’essaierai d’éditer un petit article…
Philippe MARGOT
Excellent article – En Suisse, nous sommes habitués depuis longtemps à l’offre de vins étrangers et au même problème des AOC qui a été calqué sur la France. Notre vignoble de 15’000 ha, un mouchoir de poche, regorge d’appellations, nous parlons 3 langues (français – italien – allemand et même le romanche, localement) ce qui ne facilite pas les choses pour la compréhension de nos étiquettes !Revenant de la Rioja-Ribeira del Duero-Castille, nos constatons un développement des surfaces viticoles et surtout des contingences qualitatives imposées sur les différentes qualités de vins (4 catégories: Joven – Crianza – Reserva – Gran Reserva). Plus on monte en qualité plus la durée de mûrissement en barriques et en bouteilles s’allonge, avant la mise sur le marché. Cette legislation évite la consommation prématurée de vins. Ils se dégustent tout à leur avantage.Enfin puisque le Chablis est cité à plusieurs reprises dans cet article, un peu d’humour:Deux Californiens qui ne s’étaient plus rencontrés depuis longtemps, s’arrêtent au bistro pour boire un verre de vin blanc ouvert appelé partout « chablis jug wine » (vin local qui ne contient même pas un grain de Chardonnay).Dans la discussion, l’un dit à l’autre. Tu sais ce que je viens d’apprendre. Du Chablis, ils en font aussi en France !
Emmanuel DELMAS
Une fois de plus, excellent commentaire, cher Philippe ! ,'()