La dégustation portait sur des appellations régionales et communales de la Vallée Rhodanienne du sud, dite méridionale. Millésimes 2004 et 2005
Le millésime 2005, après nombre de dégustations des primeurs en grands crus classés de Bordeaux, a démontré son potentiel absolument ahurissant.
Mais, aujourd’hui, les très grands domaines ont la capacité de façonner des vins massifs, concentrés chaque année…sauf en de rares exceptions.
Nous allons bientôt (si ce n’est très vite), être amenés à nous poser LA question des conséquences du réchauffement climatique sur le vin et les vignes en France.
Néanmoins, dans l’immédiat, restons sur cette dégustation
Si, les grands vins bordelais issus de ce millésime 2005, (retour sur cette dégustation ) ont tout pour eux, c’est à dire, richesse, matière, concentration et surtout fraicheur, et tanins rugueux mais fourrés (en règle générale…surtout rive gauche), on aurait pu en douter des vins issus d’autres régions, et de moindre qualité.
MILLESIME 2004
Une centaine de vins à déguster en ce jour, parmi lesquels des échantillons issus du millésime 2004, d’où l’on peut extraire de celle-ci une certaine hétérogénéité, et des ossatures parfois bancales voire alcooleuses.
Le stress subit par les pieds de vigne dû à l’été caniculaire 2003, a apporté des rendements élevés. Il était impératif de limiter ceux-ci afin de permettre aux raisins de mûrir de façon la plus confortable possible.Ce qui ne fut pas systématique, à en croire la dégustation.
MILLESIME 2005
Bien qu’il soit encore trop tôt, pour le juger, on peut déjà coucher sur papier quelques ressentis.
Ce millésime impressionne par sa faculté à réunir une immense homogénéité. Les vins en ressortent très denses, opulents, séveux, et emplis d’une fraicheur essentielle en fin de bouche. Des vins souvent racés, qui prendront leur temps afin de se laisser découvrir.
Des Côtes du Rhône génériques, aux Côtes du Rhônes villages (en l’occurence Sablet, St Maurice, Rasteau, Cairanne), les équilibres se sont montrés parfaitement maitrisés.
En revanche, si les textures des vins dits Communaux sont spectaculaires en terme de strcuture, il est à noter que quelques domaines se sont laissés submerger à leur tour par un climat parfois trop généreux en chaleur. Ce fut le cas pour quelques échantillons en Gigondas, et en Chateauneuf du Pape.
Surprise ?
Pas forcément, car déjà, en 2003, (millésime caniculaire), certains domaines ont été radicalement dépassés, et semblaient foudroyés par des chaleurs bien trop écrasantes. Il en résultait des vins parfois trop orientés sur des architectures lourdes, voire écrasantes (nez de fruits confiturés, pour certains notes de pruneaux, de fruits secs). Ce qui, pour 2003, ne surprendra que peu de monde.
Mais, oui, en 2005, certains domaines se sont laissés envahir par l’euphorie ambiante. Bien entendu, ces déceptions restent toutes relatives face à l’ensemble de ces appellations.
CONCLUSION
Après le si atypique 2003, le compliqué 2004, et le superbe potentiel du 2005, millésime époustouflant s’il en est… en guise de conclusion, est il possible de se poser quelques questions, dont celle-ci:
Est-il possible d’imaginer dans un futur assez proche que la carte des vignobles français puisse se retrouver chamboulée par les conséquences du réchauffement climatique ?
Emmanuel DELMAS
avec moderation
Voici une question qui mérite d’être posée.C’est la première fois que j’entends parlé de ce thème très précis alors que chaque jour nous y fait penser pourtant…Si les vignes sous la loire risquent fort de devoir travailler avec des millésimes très chauds de facon régulières, peut etre verront nous des terroirs auparavant exclus renaitre… Par exemple en Moselle ou à Toul il se pourrait bien que ces régions voient la qualité de leur récolte s’améliorer… quand pensez vous ?Autre question plus terre à terre… je suis sous equipé en vin de la vallée du rhone… pourriez vous me conseiller quelques références raisonnables (en terme de prix).Merci par avant Emmanuel et bravo pour votre travail !
Emmanuel DELMAS
Bonjour,
Effectivement, d’ici quelques années des régions peu favorisées voici quelques décenneies pourront espérer élaborer des vins de qualité.
S’agissant de vins rhodaniens, songez aux Crozes hermitage, St Joseph, Vacqueyras, St Péray blanc, envoyez moi un e-mail, j’essaierai de vous répondre rapidement.
Marc
Cette question du réchauffement climatique n’est en effet pas du tout anodine. Heureux de voir le sujet abordé ici. Il me semble avoir entendu que des grands noms du champagne avaient fait de récentes acquisitions en…Bretagne.
Elise Mark-Walter
Très juste, vous avez raison c’est un vin sarde ! Le Terre di Ginestra en revanche est sicilien. Je note bien vite votre conseil 🙂
Elise Mark-Walter
Bonjour, votre réaction (prospective, certes) est la meilleure qui puisse être. Responsable et optimiste. C’est aussi à l’amateur de vins de remettre en question sa routine gustative. J’ai découvert par exemple récemment – rien à voir avec le Rioja, j’ai pu moi aussi en apprécier de bons 🙂 – un vin sicilien réellement surprenant, grâce à ma caviste : le Vernaccia di Oristano.Un vin élégant qui rappelle le porto avec une dominante de noisette grillée et d’amande qui peut supporter très bien le miel de châtaignier. brebis bienvenu ! 🙂
Emmanuel DELMAS
Bonjour 😉
Agréable la Vernaccia di Oristano, qui pourrait faire penser à un Jérez espagnol. Effectivement noix, noisettes, et amandé, sur de jolies phases oxydatives. Petite rectification, ce vin est élaboré en Sardaigne, non en Sicile.
En revanche, je vous invite à déguster un vin rouge fort interessant, provenant du cépage Néro d’Avola, en Sicile.
Et oui, il est important de garder l’esprit très ouvert, s’agissant du vin…ainsi la découverte est elle encore mieux accueillie.
Emmanuel
Mr Lung
J’espère bien que les vins ne se transformeront pas tous en Rioja ou en Toros pour autant. Il est vrai que ces vins ont leur charme propre mais ils atteignent rarement (à mon humble avis) la subtilité des bourgognes. Sans compter que faire des excès de vins à 14° comporte des inconvénients notoires ;-)Merci en tout cas pour ces analyses livrées sur 2005.
Emmanuel DELMAS
Bonsoir,
Disons qu’il ne faut pas non plus caricaturer…;-) Il existe des vins sublimes en Rioja, orientés sur des ossatures plus rondes, aux finales fondues. J’ai toujours du plaisir à déguster une belle rioja, gran reserva, ou un ribera del duero.
Mais plus au nord, les Priorat sont parfois spectaculaires, sans parler de vins plus approchables tels Catalayud, ou un Costers del Segre…iil y a tant à découvrir. Mais certains vins semblent bien poussés par la technique, mais sont bons, voire excellents.
Il suffit de seremettre en questions, et de bien s’adapter.
Elise Mark-Walter
Quel angle pertinent ! C’est la première fois que je le vois abordé. Et pourtant, cette question que vous soulevez avec tout votre professionnalisme semble non seulement se poser mais s’imposer. le climat progressivement californien ? sur le Haut-Médoc, Puligny-Montrachet, le terroir champenois… on peut imaginer désastreuse cette nouvelle alchimie entre un vin, un domaine, un terroir (dont le climat est une donnée) et un climat qui aura changé. est-ce que l’on va dans nos terroirs tempérés vers des vins à 14° avec un peu trop de fruit à vendanger plus vite ?
Emmanuel DELMAS
Bonjour,
Effectivement, les données vont forcément évoluer. A tel point qu’il est possible d’imaginer que le climat bordelais, puisse correspondre d’ici une vingtaine d’années, au climat de la Rioja espagnol, que celui du sud anglais se rapproche significativement du bordelais actuel…pour le moment cela ne sont que suppositions, ou supputations.
Mais à en croire certains agronomes, la réalité semble bien présente, et va se préciser dans les années à venir. Ne nous alarmons cependant pas, car n’oublions pas que l’homme a toujours su s’adapter aux changements, quels qu’ils soient.
Mais ce thème pourrait être amené à être développé un jour ici…
Emmanuel
jean pierre et danielle
Au sujet de l’évolution du climat…
J’étais producteur de pruneaux d’Agen et de cerises. En 10 ans, le climat s’est modifié profressivement sans que personne ne s’en rende trop compte. Les hivers sont devenus plus froids et plus secs. Les primtemps ont connu de fortes gelées matinales suivies d’ensoleillement exceptionnel. Le vent est devenu quoditien et a souvent desséché les arbres. Et les tempêtes, 3 en 7 ans. La derniere, de juillet 2006 a détruit 1 000 arbres sur l’explotiation ( sur 5 000) . Si on ajoute la grêle, violente et fréquente qui a détruit ce que la tepête avait épargné.
Il va falloir soit réfléchir à changer de culture soit à attendre que l’INRA ( ou quelqu’un d’autre) propose des variétés qui s’adapteront au changement climatique.
Il en est de même pour la vigne…..
Sinon, J’ai de très bons souvenirs d’un chateau neuf Paul Avril 1979 et 1985 ….
Emmanuel DELMAS
Bonjour,
Superbes, les vins de Paul Avril ;-()
Merci pour ces précieuses précisions, qui prouvent à quels points ces changements climatiques (voire parfois dérèglements) s’opèrent depuis quelques temps déjà.
Et des solutions seront trouvées, j’en suis persuadé. Encore merci pour cette intervention,
A bientôt
Emmanuel