Une table de 3 personnes avait décidément bien envie de se laisser aller au plaisir absolu ce soir là.
Dans le but de taquiner leurs papilles, leur choix fut très judicieux, en dégustant un Bollinger RD 1995. RD: Récemment Dégorgé. Sublime de finesse, de classe et de suavité, je préfère garder la note de dégustation pour un peu plus tard…
Afin d’accompagner leurs entrées et de marier leurs ravioles de homard, je les oriente sur un très grand vin rouge.
Voilà 3 semaines, 2 de ces messieurs avaient commandé un Cheval Blanc 1981, classieux, raffiné, mais légèrement essoufflé.
Il était très aisé de les diriger sur un pinot noir accompli, abouti, et extraordinairement généreux. Ainsi, ils poursuivent les débats avec la TÄCHE 1998, du Domaine de la Romanée-Conti.
Un vin de rêve, certes jeune, mais si fantastique, et généreux… je vous invite sur la note qui lui est consacré.
S’ ensuivent des filets de boeuf, et là, le choix fut naturellement porté sur un Pétrus 1994. Ce vin est très évocateur de ce qu’est Pétrus, tout en finesse, malgré une rare densité. La note de dégustation vous sera offerte ici-même, Dimanche.
Bollinger RD 1985: 320 euros
La tâche, Domaine de la Romanée Conti 1998: 1 500 euros
Pétrus 1994: 1610 euros
Emmanuel DELMAS
Patrick
Bien que je sois dans le métier, je trouve délirant le prix des vins. Et de certains restaurants. Ces produits ne s’adressent plus à ceux qui sont capables de les apprécier, mais à ceux qui sont capables de les acheter. Et qui sont rarement les mêmes. Il y a environ 10 ans, un employé qui était fou de vin pouvait se payer les plus grandes bouteilles (sauf la RC, Pétrus et Le Pin) avec 15 jours de salaire. Aujourd’hui on ne compte plus le nombre de bouteilles qui chez le producteur représentent plus d’un mois du même salaire. C’est parfaitement imbécile. Je suis d’autant mieux placé pour le dire que je peux goûter ces vins et aller dans ces restaurants gratuitement. C’est le principe de la confiscation du bon par les nantis qui me révulse. Pour ma part, je refuse de mettre plus de 60 dans un vin, quel qu’il soit, et encore une ou deux fois par an.
Emmanuel DELMAS
Réponse d’Emmanuel:
Je suis complètement d’accord avec toi, Patrick. Ces vins sont inabordables, et, de plus en plus le sont. A croire, que le vin est désormais pris pour cible afin de gagner des plus values, spéculatives.
Ce qui me révulse n’est pas de constater que Pétrus et la DRC soient si chers, (leur histoire, et leur qualité ne sont plus à prouver), mais que d’autres micro-cuvées, dopées par de gros moyens financiers, humains et logistiques arrivent à leur hauteur en terme de prix.
Alors, que voilà 20 ans, la plupart de celles-ci n’avaient pas lieu de citer.
Je n’accuse personne, surtout pas, ce n’est pas mon rôle.
Mais, afin d’éclairer un peu les lanternes, qu’un EISWEIN d’Egon MULLER coûte près de 500 euros la bouteille départ cave, et se retrouve aux enchères à 3 fois son prix n’a rien de choquant, eu égard sa rareté et la prise de risque.
Mais qu’une caisse de 3 bouteilles de Screaming Eagle, vin californien du millésime 1997 se retrouve à plus de 12 000 euros la caisse (3 bouteilles) soit 27 000 francs la bouteille, en 2000, à San Francisco,là, je suis outré.
Ceci dit, à ce niveau, on essaie de fabriquer du rêve…sauf que le rêve, à mon sens, il existe pour un Vega Sicilia, el Unico, même si son prix de 250 euros, reste très cher…mais là, on est bien dans le rêve d’un vin unique au monde, avec son histoire.
Mais, je te suis Patrick, dans ton idée. Les vins sont devenus produits de luxe pour certains, sans justification.
moi
tu arrive a communiquer ta passion et c’est essentiel
bonne chance pour ton nouveaux design !
anya
personellement je ne bois pas de vin mais c’set quand même intéressant.
bonne continuation!
Mercotte
Si on parle de prix, le petrus c’est pas mal non plus ! j’ai au moins une fois dans ma vie bu les 2 ! quel souvenir ! mais heureusement ce n’était pas au restaurant et pour avoir 1 bouteille de la Romanée Conti on avait un assortiument Echezeaux, La Tâche, Richebourg et le Romanée St vivant si je me souviens bien ! en tout cas que du plaisir !
latataflo
Bonjour, modestes vins! J’aime le vin, j’ai habité à Gevrey-Chambertin durant 7 ans et j’ai même travaillé chez des viticulteurs et j’avoue que j’apprécie les grand crû de Bourgogne (et ceux d’ailleurs aussi). Cela dit, en ce qui concerne la Romanée-Conti, je trouve qu’il y a là une abbération quant au prix et à la façon de traîter ce vin. Non pas que ne puisse pas me le payer car je le peux mais il faut garder les pieds sur Terre, ce n’est que mon avis. Alors, par conviction d’abord, je n’en boirai surement jamais et je n’en aurai jamais aucun regret …
Emmanuel DELMAS
Réponse d’Emmanuel:
Le prix est certes rédhibitoire, et je le comprends fort aisément. Cependant, les sensations et émotions ressenties sont réellement énormes. Ensuite, je pense que le rapport prix / plaisir est dépendant de tout un chacun et de la valeur que l’on veut bien donner aux choses.
La Romanée Conti, est prohibitive, mais un Echezeaux peut se trouver à moins de 200 euros la bouteille, ce qui reste encore approchable.
Quant on connait les prix des grands Bordeaux…
Et, il ne faut jamais dire jamais…la vie peut réserver parfois de jolies surprises.
Papilles&Pupilles
Merci beaucoup de ta réponse Emmanuel.Je découvre un peu plus ton métier à chaque visite.
marion
ce doivent être des moments privilégiés pour un sommelier, j’espère suffisamment fréquents. Le plaisir que tu as eu à les conseiller se ressent très bien dans ton article, c’est un vrai plaisir de te lire (encore)
Emmanuel DELMAS
Il est vrai que ces échanges sont souvent très mrivilégiés. L’intérêt est de faire et se faire plaisir.
Et, actuellement, ces moments se font relativement rares dans la vie actuelle. Le stress, la pression, les doutes, craintes envahissent souvent le quotidien.
Merci pour le compliment, il me touche, car, il semble sincère.
Mercotte
Et bien dis donc , quelle belle table de connaisseurs effectivement, boire ces vins au restaurant, c’est quelque chose!!!
Emmanuel DELMAS
Un très bel échange, c’est vrai.
Papilles&Pupilles
Pardonne moi une question de néophyte mais goûtes tu ces vins ? Comment ça se passe sur de telles bouteilles ? Est ce un moment partagé avec le client ? Et curiosité toute féminine, est ce que la bouteille est vide en partant ou bien en reste t il parfois ?
Emmanuel DELMAS
Réponse d’Emmanuel:
Le sommelier se doit de déguster normalement tous les vins proposés au client, au moment de l’ouverture de celles-ci. Cependant, ayant bien souvent un trop grand nombre detables à servir, je me réserve le droit de sélectionner les vins à déguster. L’idée est d’une part de s’assurer que le vin est sain, et non bouchonné.
Mais aussi, et surtout, cela permet au sommelier de constater l’évolution de chaque vin. Ainsi, il se peut qu’un vin dégusté hier, se retrouve dans quelques mois, complètement fermé. Ainsi, je sais que celui-ci, sera à laisser en cave.
A l’inverse, un vin plus à maturité, sera plus facilement proposé, afin d’en faire bénéficier aux clients.
C’est ainsi que la cave vit, grâce à une rotation, et cela ne peut se faire que grâce à la dégustation permanente des vins proposés par la carte du restaurant.
Il est évident, qu’en plus de ses avantages, un sommelier se doit d’être en mesure de décrire le vin de façon très précise. Imaginez que celui-ci soit incapable de le faire pour de très grands vins…
Il peut en effet rester un peu de vin, au fond de la bouteille, si le client n’a pas réussi à la terminer, cela n’arrivant que peu souvent.
Autrement, après avoir décanté un vin, il reste un peu de dépôt au fond de la bouteille. Ii peut m’arriver d’en apprécier toute l’essence une fois le client parti, tout du moins, juste en apprécier le nez.
Le vin étant totalement différent au moment de l’ouverture et 3 heures après.
Iris
Je vais avoir l’occasion, de déguster ce « monument » et les autres vins de la RC la semaine prochaine dans un millésime plus récent – tu me mets l’eau à la bouche.
Emmanuel DELMAS
Réponse d’Emmanuel:
Tu vas assister à un véritable feu d’artifices, la DRC reste un très grand monument, du Montrachet à la Romanée Conti, l’épithète de l’excellence de bout en bout, en te souhaitant une bonne dégustation, que tu nous feras peut-être partager, avec de jolis commentaires ?